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“ La Survivante ” de Marie-Paule McInnis

Récit :

survivante Après une série sans fin de tragédies survenues depuis son adolescence, Marie-Paule McInnis subit en 1996 une épreuve que peu d’êtres humains ont connue, c’est-à-dire la mort de ses deux fils, assassinés par leur père, lequel s’est ensuite suicidé. Bien décidée à s’en sortir, madame McInnis se donne trois objectifs qui deviendront autant de raisons de continuer à vivre : étudier à l’université, écrire son histoire et surtout faire inhumer de nouveau ses enfants loin de leur père, afin qu’elle puisse se recueillir en paix sur leur tombe. Avec La Survivante, cette victime de violence conjugale, meurtrie par la mort de ses enfants et déchirée par l’injustice, décide de rompre le silence et d’aider les victimes de violence. Madame McInnis croit ainsi que la disparition de Jérôme et de Justin n’aura pas été vaine, si elle permet de sauver ne serait-ce qu’une seule autre personne. Car le but avoué de ce livre est à la fois d’encourager les victimes de violence à porter plainte et d’aller chercher de l’aide auprès des ressources qui sauront les guider et les accompagner dans leurs démarches. Il est désormais clair pour Marie-Paule McInnis que l’homicide conjugal n’est pas un drame passionnel, ni un acte de désespoir et encore moins un geste d’amour. Au contraire, il est souvent précédé de toute une série d’actes stratégiques et répétitifs qui aboutissent à une longue relation de violence et de contrôle, et ce, jusqu’à l’inévitable…

Avis :

C’est un livre qui mets K.O. son lecteur. Un livre troublant, émouvant. Les larmes coulent toutes seules. Impossible de les arrêter. Que l’on soit homme ou femme, l’émotion sera présente à chaque page. Des milliers de questions passeront dans la tête, sans jamais trouver les réponses. Je tiens à souligner le talent de l’auteure, qui pour un premier livre, est vraiment réussi. J’espère qu’elle n’arrêtera pas en si bon chemin. J’aimerais voir son talent au service d’un roman, l’effet sera saisissant. Pour en revenir à “La Survivante”, n’hésiter pas à vous le procurer. J’ai rarement senti une telle émotion dans ma vie de lecteur. Si vous êtes ému comme moi à la lecture, c’est que vous avez un coeur. Magnifique!

Auteure :

Marie-Paule McInnis est née en mai 1964 en Gaspésie. Elle est la cadette de quatre enfants. Sa mère est une femme au foyer très dévouée. Quant à son père, qui travaillait comme cheminot pour la compagnie de chemin de fer Canadien National, il est décédé d’un malaise cardiaque lorsque madame McInnis avait à peine 13 ans. Après avoir vécu plusieurs deuils supplémentaires, dont ceux de son premier amoureux et de sa mère, elle est appelée à traverser une horrible épreuve. En effet, dans les années 1990,  son ex-conjoint s’enlève la vie après avoir assassiné ses deux garçons. Suite à ce tragique événement, Marie-Paule McInnis doit faire face à de nombreuses injustices, mais elle a su se battre et rester forte. C’est ainsi qu’à la fin de cette décennie, elle entre à l’Université du Québec à Chicoutimi, où elle obtient son baccalauréat en psychologie puis un certificat en réadaptation sociale. Après avoir travaillé quatre ans au Centre féminin du Saguenay, cette auteure qui habite le Saguenay œuvre aujourd’hui en tant qu’intervenante en éducation spécialisée. Avec son nouveau conjoint, madame McInnis a participé à une émission de télévision animée par Claire Lamarche, où elle a remporté en 2001 le titre de « Couple le plus formidable du Québec, » suite à un vote du public dans lequel elle a trouvé le plus grand des réconforts. Et en 2009, après des années de deuils et de combat, madame McInnis décide enfin de faire publier son histoire, aux Éditions JCL.  Car madame McInnis est persuadée qu’il est à peu près impossible de se sortir seule d’une situation de violence conjugale, mais surtout qu’il est beaucoup plus dangereux de garder le silence que de dénoncer. « À toutes les victimes, ne nourrissez jamais l’espoir que les choses peuvent changer si aucune aide ne vous est apportée. »

Références :

Titre : La Survivante
Auteure : Marie-Paule McInnis
Éditeur : Les Éditons JCL
ISBN : 978-2-89431-412-8
Prix : 24,95 $

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Questions à Marie-Paule McInnis

MiQ : Votre livre "La Survivante", vous racontez votre histoire bouleversante que vous avez vécue. Quel fut l’élément déclencheur pour commencer la rédaction?

Marie-Paule McInnis : J’ai toujours su que, si je réussissais à survivre au meurtre de mes fils, je me devais un jour d’écrire un livre en leur mémoire et, par la même occasion, de venir en aide à d’autres personnes aux prises avec ces situations conjugale où règne le contrôle. Par contre, j’essayais quand même de m’enlever cette idée de la tête puisque j’avais réellement peur de mourir si je ressortais toute cette douleur que j’avais entassée dans le plus profond de mon être pour réussir à respirer et à survivre. Paradoxalement, au fil des ans, cette même douleur intolérable me poussait tout de même à le faire. C’était une promesse, une mission pour ma survie et celle de bien d’autres. Je me disais que si je pouvais sauver, ne serait-ce qu’une seule âme, du cycle de la violence, je pourrais me dire : « Mission accomplie ».

MiQ : À travers ce livre, est-ce aussi pour laisser une trace dans l’histoire de vos enfants, afin de ne pas oublier ce qu’ils ont vécu?

Marie-Paule McInnis : Oui évidemment, je ne veux pas qu’on les oublie et que l’on oublie ce qu’ils ont vécu. Un livre ne meurt jamais… alors c’était aussi ma façon à moi de les faire revivre et de faire connaître au monde ces petits êtres merveilleux.

MiQ : Est-ce que vous vous êtes censuré pour écrire ce livre pour ne pas blesser certaines personnes?

Marie-Paule McInnis : Oui, évidemment. Mais la raison d’être de ce livre n’était pas motivée par la vengeance. J’ai essayé, autant que possible, de m’en tenir qu’à l’essentiel et de faire en sorte que ce livre soit constructif. Ainsi, mon objectif était de mieux faire comprendre le cycle de la violence conjugale, l’emprise qui pèse sur les victimes et la peur que les êtres violents peuvent instaurer leur permettant de maintenir leur domination sur leur conjointe. Les gens doivent aussi comprendre que la violence conjugale n’est PAS une perte de contrôle mais bien une PRISE de contrôle (même de pouvoir) d’une personne sur une autre et que les individus violents se voient légitimer leurs actes par toutes sortes de motivations qui les entraîne toujours plus loin. Ainsi, elle est une façon de dominer l’autre et affirmer son pouvoir sur elle. De même, en permettant aux gens de mieux comprendre ces situations qui sont compliquées et dont les enjeux motivationnels sont parfois bien camouflés, ils pourront peut-être aussi les percevoir plus rapidement et ainsi sauver du temps, et même des vies. De plus, j’espère aussi que ce livre pourra servir à améliorer les ressources actuellement disponibles, de même que diminuer les probabilités que de tels drames surviennent.

MiQ : La réception du livre est excellente. Vous attendez-vous à un tel accueil?

Marie-Paule McInnis : Non… vraiment, c’est au-delà de mes espérances. D’ailleurs, j’en profite encore une fois pour remercier tous mes lecteurs. Je suis VRAIMENT ravie qu’on y porte un aussi grand intérêt car la lutte contre la violence conjugale requiert l’engagement de nombreuses ressources et l’information livrée à la population est essentielle dans l’identification précoce de ces cas de violence. Je voulais aussi faire la lumière sur les nombreux mythes véhiculés sur cette réalité et qui m’ont fait si souvent sursauter comme par exemple : « L’homicide conjugal est un drame passionnel, un acte de désespoir, un geste d’amour, etc ». Je ne dis pas que ces situations n’existent pas mais il faut distinguer un acte impulsif, irréfléchi et un acte délibéré et pensé. Une histoire de violence, par définition, s’étend sur plusieurs années, et ça implique une chronicité qui dépasse la folie d’un instant. Ainsi, la réalité est que : L’homicide conjugal est un MEURTRE, souvent prémédité. Il constitue souvent l’aboutissement d’une longue relation de violence, de contrôle et de domination.

MiQ : Pensez-vous que "La Survivante" pourrait aider plusieurs personnes qui vivraient une séparation difficile?

Marie-Paule McInnis : Du moins, je l’espère. Je souhaite de tout cœur que ce récit incitera les personnes ayant besoin d’aide à ne pas hésiter d’avoir recours aux ressources nécessaires.

MiQ : Le témoignage est découpé en plusieurs petits chapitres, comme une enquête policière. Allez-vous continuer à écrire des livres?

Marie-Paule McInnis : Faire face à la souffrance demande beaucoup de discipline. Au travers ce cheminement chaotique, j’ai appris et évolué. Je sais, il m’en reste beaucoup à apprendre mais je crois qu’au-delà du récit de ma vie, j’aurais encore beaucoup à livrer. Alors si mes précieux lecteurs en font la demande, il se pourrait que j’écrive à nouveau.

MiQ : La violence conjugale est un thème qui me semble de plus en plus présent dans les médias. Chaque semaine, des femmes sont victimes de cette violence. Selon vous, est-ce que la justice fait-elle bien son travail, quand c’est le temps de juger le coupable?

Marie-Paule McInnis : La violence conjugale est un sujet encore très tabou. On se retrouve souvent avec des agresseurs sans aucun antécédent judiciaire ou avec un bon statut social car les victimes n’osent pas porter plainte. Les victimes de violence craignent de s’engager dans des procédures judiciaires pour dénoncer ou pour se séparer de leur partenaire car elles ont peur que la violence augmente ou que les lois ne pourront pas leur offrir une protection nécessaire. Aussi, il arrive souvent dans ces situations qu’un jugement de la Cour n’empêche pas le conjoint d’être violent ou menaçant. De plus, les victimes engagées dans des procédures judiciaires au sein de tels contextes sont souvent dans une position de fatigue morale et psychologique qui n’aide en rien à une défense efficace et soutenue… Je pense que ce n’est pas simplement une affaire de justice mais qu’au contraire, c’est l’affaire DE TOUT L’MONDE car la NON tolérance de la population à l’égard de ce type de violence aiderait grandement les victimes aussi. En connaissant mieux la problématique, on pourrait peut-être revoir les lois. J’avoue, c’est très complexe.

MiQ : Après avoir vécu une violence conjugale, croit-on encore en l’amour et de tomber amoureuse de nouveau?

Marie-Paule McInnis : Pour ma part, je suis mariée avec un homme extraordinaire que j’adore. Évidemment, je crois qu’il faut beaucoup d’amour pour réussir à évacuer les peurs profondément imprégnées dans tout notre être mais c’est possible puisque j’y suis arrivée. Vous auriez dû demander cette question à mon mari. Il aurait sûrement répondu : Beaucoup d’amour et beaucoup de PATIENCE aussi.

Copyright – Made in Québec – Jean-Luc Doumont – 2009
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Catégories :Juillet 2009
  1. 23 août 2009 à 6:02

    Salut! j’ai lu ton livre tu es une battante bravo! on sait connus au centre pour femmes victimes de violence on fumait ensemble dehors. Tu me trouvait drôle en 2004 je pense. Ne lâchez pas.

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